2e série. numéro 051. Dimanche 10/10/1897. grève à Trélazé

Extrait du Père Peinard n°51, deuxième série. Dimanche 10 octobre 1897. page 6. Voir la « une »

« Rouspétance des carriers

Les gas des carrières d’ardoises, de Trélazé et des environs d’Angers ne sont foutre pas des fausses-couches.

Il s’en faut bougrement, nom de dieu !

Pour s’en convaincre y’a qu’à voir la trifouillée de précautions que prennent les grosses légumes pour une petiote grève qui vient d’éclater à Trélazé.

Oh ! là là ! quoi donc feraient les matadors de la haute si les frangins des carrières se foutaient en rogne pour de bon ?

Ils n’auraient pas assez de goguenets pour foirer !

Dès que la grève actuelle a pris naissance, vivement les pandores ont rappliqué pour protéger les patrons.

Les singes feraient griller leurs prolos a petit feu ou les écorcheraient tout vifs que ce serait le même fourbi : les gendarmes s’amèneraient, – toujours pour protéger les patrons !

Donc, tous les cognes de l’arrondissement d’Angers se sont amenés à Trélazé et se sont installés dans tous les coins du patelin, histoire d’influencer les grévistes.

Ils perdent leurs temps ces andouilles-là !

Ce n’est pas eux, ni leurs grands sabres, ni leurs revolvers qui influenceront des riches fieux de la trempe des carriers.

Ces sacrés cognards ont d’ailleurs pu s’en apercevoir l’autre matin : après une réunion qu’ils avaient tenu à La Maraîchère, les grévistes se sont amenés sur les carrières et, sans plus faire attention aux gendarmes que si c’eut été un régiment de limaces, ils ont dételé les canassons des compteurs qui se préparaient à faire des livraisons ; ensuite, pour varier le plaisir, ils ont brisé les auvents et des piles d’ardoises aux Petits-Carreaux.

Aussi les charognards de la haute, trouvant que les gendarmes ne suffisaient pas, ont fait rappliquer des lignards.

Les bandits auraient-ils l’intention de repiquer aux massacres de Fourmies ?

Nom de dieu, m’est avis que ça leur jouerait un mauvais tour !

Le populo a l’air passablement flemmard et avachi, hélas !

Quoique ça, si les fusils Lebel « faisaient merveille »  à Trélazé, ça pourrait bien lui faire monter la moutarde au nez.

Et d’ailleurs, la grève se généralise : les fendeurs se tâtent le pouls, pour savoir s’ils n’emboîteraient pas le pas aux grévistes.

Ça ferait alors quelque chose comme 3,000 prolos sans turbins !

Et fichtre, si les chameaucrates tentaient quelques scélératesses contre les bons bougres des ardoisières, qu’ils y prennent garde : tout l’Ouest rouspéterait !

Ce serait une nouvelle Vendée. Et foutre, non plus que Vendée réactionnaire et cafarde, mais une Vendée révolutionnaire et libertaire,

Quelque chose comme une entrée en danse du vieux monde.

Le prélude du chambardement qui pend au blair de la pourriture bourgeoise ! »

Laisser un commentaire